Interventions #29
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La critique démunie
Le résultat des élections américaines ou la nécessité d’aller au-delà des idées convenues

, par Temps critiques

Les analyses des résultats des élections américaines, quand elles sont en provenance de l’extrême gauche1, ne sont pas très originales et rejoignent d’ailleurs parfois les interprétations avancées par des journalistes ou politologues indépendants : pas de programme clair chez les démocrates, discours ultra urbain en direction des classes moyennes supérieures, abandon des couches populaires et mépris de classe, adresse aux « communautés » comme si elles étaient homogènes, l’approche erronée de la place de femmes, qui prend tout simplement le contrepied de leur image traditionnelle avec en plus une erreur d’appréciation sur l’importance des « droits reproductifs » dans la campagne électorale, etc. Ces analyses ne sont pas fausses pour autant, mais ce n’est pas là, la question ou le problème. En effet, on est relativement nombreux et dans nombre de pays, à avoir fait la remarque critique d’un abandon de la question sociale au profit de questions sociétales, de la part des pouvoirs en place, mais aussi de la gauche et pas seulement de la gauche dite de gouvernement, puisque l’extrême-gauche a introduit le genre, la race, la préférence sexuelle comme politique, la mise en avant des minorités à la place de la majorité, la lutte contre les discriminations à la place de la lutte contre les inégalités, dans les problématiques actuelles.

Mais parmi les commentateurs d’extrême-gauche, il y en a un bon nombre là aussi qui posent cela en termes de choix stratégique et politique comme s’il y avait juste à bien cibler les sujets et les électeurs (c’est, par exemple, la stratégie de Rufin). Un choix franchement électoraliste, parce que cela reviendrait à un échange standard de la même stratégie en direction du « peuple » qu’il s’agirait seulement de toucher. Or, il ne s’agit plus de « conscientiser » des masses incultes pour les « éclairer » à l’énergie renouvelable et propre de la postmodernité. Ou alors, d’un point de vue plus radical, comme s’il suffisait juste d’une décision politique individuelle à prendre, qui serait de faire le bon choix théorique, avec une perspective révolutionnaire alternative en paquet cadeau (du type, « Moi je choisis la question sociale, et toi ? »). Or, rien de tout cela. Nous ne sommes plus dans le contexte social et politique des années 1960 de l’imagination au pouvoir. Aujourd’hui, nous sommes passés aux imaginaires mis en concurrence où « la notion d’intersectionnalité est moins faite pour annoncer le rassemblement des dominés, que pour cartographier les tendances qui ne cessent de l’ajourner2 ».

Si les raisons de la défaite des démocrates sont souvent bien ciblées par la critique, ce sont les raisons de la victoire des républicains et surtout de Trump qui sont occultées. L’impression d’absence de pilote dans l’avion, d’être livrés à la machine bureaucratique (États-Unis) ou technocratique (UE) par des politiciens sans envergure, qui seraient incapables de répondre aux besoins essentiels de la population, représente aujourd’hui une constante dans « l’opinion »… et un crève-cœur pour les « degauche ». Or, ces besoins essentiels, dans la société capitalisée, que cela nous plaise ou non, sont plus focalisés sur l’idée de liberté, d’accession individuelle au confort et au bonheur que sur celle d’égalité. Il n’y a donc rien de très étonnant que, dans sa pointe avancée, les libertés d’expression (via les réseaux sociaux et les organes privés de l’information) et d’entreprendre (le mimétisme pour le tous winners plutôt que le souci vis-à-vis de loosers à qui on réservera le care) soient perçues comme absolues, l’égalité et les solidarités considérées comme relatives3. L’appel de Trump, lui-même entrepreneur milliardaire, à Musk comme conseiller du gouvernement est un signe fort de cette tendance, quand la France en reste encore au pantouflage du public vers le privé pour son personnel politique et à des appels du pied macronistes à des renforts issus de la « société civile » (cf. critique infra) pour renouveler le cheptel politicien. À un degré moindre, les phénomènes Tapie et surtout Berlusconi étaient annonciateurs d’un nouveau type d’autocrate ne correspondant absolument pas aux vieilles figures de chefs fascistes aujourd’hui discrédités. 

Quand l’absence de direction se fait sentir et qu’aucune perspective de prise en charge alternative et dans la lutte collective ne se dégage, il n’est donc pas illogique que la question du chef se pose et ce, dans les termes d’une surenchère autoritaire autour d’une ambition de pouvoir personnel contournant les règles des régimes démocratiques traditionnels, a fortiori dans des pays à régime mixte, présidentiel comme aux États-Unis ou semi-présidentiel comme en France. Cette politique autoritaire s’avérant d’autant plus efficace, au moins au niveau de sa propagande informationnelle plus qu’idéologique, qu’elle taillera dans la masse en cherchant à établir des lignes de séparation entre amis et ennemis (y compris sous la forme nationaux/migrants-étrangers) et proposera une politique d’état d’exception (Carl Schmitt). Le paradoxe résidant dans le fait que ce sont ceux qui revendiquent l’union autour du peuple redéfini et retrouvé qui se proposent d’exclure pour reformer l’unité, alors que ceux qui disent défendre l’inclusion pour l’unité sombrent dans les particularismes, y compris radicaux, avec leurs batailles internes picrocholines. Ce méli-mélo, plus grand monde ne cherche à le démêler si on excepte les politologues et autres experts en tout genre. Alors, cela n’a plus grand sens de chercher à délimiter les critères de vérité entre d’un côté des politiciens traditionnels parlant la langue de bois et pratiquant la polémique à fleuret moucheté (ou la fuyant par peur d’incompétence comme Harris) et de l’autre les nouveaux spécialistes de l’esbroufe et de la grande gueule, via la diffusion de fake news sur des réseaux sociaux et des radio-télés à réalité virtuelle. Comme le dit à peu près Kamel Daoud, sur un tout autre sujet (le conflit israélo-palestinien depuis le 7 octobre) : dans certaines situations, le mieux est d’invoquer « le droit au silence », quand la raison ne peut pas être dépliée dans le raisonnable (Discours devant les étudiants de l’IEP, le 19 octobre 2024, in Libération, le 20 octobre 2024).

Ouvrons ici une parenthèse sur la notion d’opinion publique.

Jusqu’au XVIIIe siècle, l’opinion publique était celle qui méritait d’être rendue publique (par exemple, celle qu’exprimaient Montesquieu, Rousseau, Voltaire, en somme, les Lumières). C’était donc une parole en provenance des élites éclairées. Puis la notion d’opinion publique s’est démocratisée au sein de la société civile bourgeoise, un processus facilité par le développement de la presse, de la radio, puis de la télévision. Même si cette opinion publique était façonnée en partie par les médias, il n’y en a pas moins eu une autonomisation relative de cette opinion par rapport à un pouvoir politique conduit, en régime démocratique, à resserrer au possible l’écart entre politique à mener, état de la loi et état de l’opinion (cf. par exemple, la question de la peine de mort ou celle sur l’avortement ou sur le divorce en Italie). L’opinion publique, et donc sa connaissance par le pouvoir, formait un ensemble (cf. l’utilisation massive des sondages à partir des années 1980 en Europe), le premier servant d’intermédiation au second afin d’atteindre un « peuple » dont on ne parlait plus autrement qu’au travers de la figure du citoyen-électeur. [Il faudrait revenir sur les analyses de Bourdieu sur l’opinion publique, mais nous n’allons pas alourdir ce texte d’autant que Bourdieu est le seul ancien d’approche holiste ou globaliste à l’origine (cf. sa critique du sujet et sa thèse de la reproduction sociale) à ne pas avoir été repêché par les thèses postmodernes).] 

Avec la « révolution du capital », il n’y a plus de « société civile » ; les anciennes médiations que formaient la famille, l’école, l’église, l’armée, les classes, mais aussi les institutions publiques ne jouent plus leur ancien rôle de l’époque bourgeoise. C’est pourtant cette référence des médias et éventuellement des pouvoirs en place à la société civile qui est venue supplanter celle à l’opinion publique dont on ne perçoit plus guère d’écho aujourd’hui. Elle correspond à un discours performatif qui veut recréer des intermédiations là où il y a surtout aujourd’hui de l’immédiateté ; d’où, à mon avis, la montée en puissance de ce que les différentes fractions du pouvoir appellent le « populisme », c’est-à-dire, la prise en compte de la nouvelle situation de confrontation directe et sans filtre (cf. la vulgarité des deux langages utilisés de part et d’autre pendant le mouvement des GJ) entre pouvoir et peuple. Prise en compte au niveau des forces politiques nouvelles (cf. RN et LFI pour la France, mouvement Cinque stelle en Italie, Alliance pour la raison et la justice de Sahra Wagenknecht en Allemagne, partis écologistes partout) ; prise en compte aussi à la base par un mouvement comme celui des Gilets jaunes avec son refus de toute représentation et son attaque au cœur de l’État, et au niveau idéologique par les orwelliens de service qui en appellent au « bon sens ». Il est vrai qu’ils ont des excuses puisque les mêmes à gauche qui proclament que la vérité est relative reprochent à la droite de répandre des fake news. Dans tous les cas, la tendance est à l’illibéralisme du côté du pouvoir politique et à la critique des élites de la part de ceux qui se perçoivent comme dominés ou exclus d’un « système » qui, paradoxalement, ne s’est jamais autant affirmé « inclusif ». Mais alors qu’en Europe et en France, les partis d’extrême-droite cherchent à se rallier le peuple « réel », aux États-Unis Trump et les nouvelles élites conservatrices cherchent à liquider « l’État profond » de l’élite précédente, c’est-à-dire l’élite bureaucratique et financière avec sa kyrielle d’experts, certes diplômés, mais jugés déconnectés de la réalité. Face à cette accusation d’illégitimité par rapport aux anciennes élites portée par le vote Trump, le procès déjà programmé que vont intenter les démocrates et la gauche européenne sur l’incompétence crasse de leurs remplaçants (plusieurs de ceux qui sont pressentis pour les postes les plus influents faisant l’objet de controverses politiques, voire d’enquêtes judiciaires) risque d’être un flop.

Dans la révolution du capital, l’État sous sa forme nation est en crise. Il se redéploie sous sa forme réseau et, dans ce redéploiement, c’est la notion même d’opinion publique qui n’a plus de sens. Par exemple, il était encore possible de la sonder au moment de la prise de position sur la peine de mort à l’arrivée de la gauche française au pouvoir, puisque la finalité d’une loi dans la modernité était soit d’anticiper l’évolution de l’opinion en la précipitant, soit de la ratifier avec le moins de retard possible. Mais dans tous les cas, en cherchant à s’appuyer sur un sentiment majoritaire. Cela devient difficile voire impossible aujourd’hui que les identités multiples et les particularismes s’invitent dans le débat public sur les « sujets de société » en tant que forces politiques visibles et organisées (LGBT+) et non plus comme associations affinitaires (Arcadie), agissant aussi bien au sein des réseaux de pouvoir, dans les coulisses parlementaires et sur les plateaux-télé, qu’au travers des réseaux sociaux. L’opinion publique était encore, malgré le vague de la terminologie, une tentative de se référer à la totalité, mais dans un cadre, celui de l’individualisme, ne permettant qu’une approximation de la « vérité » du moment. Il n’en est plus de même quand c’est l’émiettement qui tend à prédominer, que les droits prolifèrent, voire s’opposent entre eux.

Ce sens de totalité, l’opinion publique ne l’a sans doute jamais eu aux États-Unis du fait du fort fédéralisme interne, mais en Europe, cela a pu coller à la forme nation et son pouvoir centralisé. Comme la nature a horreur du vide, la dynamique actuelle a créé de nouveaux intermédiaires, mais sur des bases plus ou moins identitaires/ communautaires, à travers les réseaux sociaux. Certains de ses réseaux représentent la voie et la voix des sans-voix et plus généralement ceux qui étaient invisibles ou invisibilisés et le sont restés (ça brasse très large puisque les réseaux militants en font partie, comme les sans-papiers) ou qui le sont devenus (les ouvriers) ; d’autres représentent ceux qui sont devenus ou qu’on a rendus visibles parce qu’ils représentent maintenant un facteur dynamique du capitalisme, par exemple par leur travail dans les nouvelles technologies, par une présence qui tend à lever certains des anciens tabous de la société bourgeoise de façon à ce que les anciennes dominations et humiliations laissent place aux nouvelles fiertés (place des femmes, tentative de sauvetage de la famille par l’inclusion de nouvelles formes). Ce tintamarre produit par la nouvelle guerre idéologique pour l’hégémonie culturelle à la Gramsci n’a plus rien à voir avec l’ancienne bataille pour « se gagner » l’opinion publique sur la base d’un programme global ; les milliards de donations à Kamala Harris n’y ont rien changé. La totalité est devenue le faux et il ne s’agit plus de la saisir à travers ses évolutions, mais d’enregistrer et décrire des faits significatifs (« stylisés », disent les experts).

Mais revenons à notre premier paragraphe. Si nous sommes hors de la bataille pour l’hégémonie culturelle qui se mène actuellement, c’est que nous avons perdu la guerre de classes et même plus largement dans ce qui transparaissait aussi comme une lutte au-delà des classes (dans le 68 français et le 77 italien comme tension vers la communauté humaine), et les théories marxistes encore audibles au sens d’entendables à l’époque, bien que déjà critiquées par Cardan (Castoriadis) dans le no 35 de la revue via son « Bilan » (conseillisme d’une part, opéraïsme de l’autre), ne le sont plus (voir par exemple le devenu de l’opéraïsme chez Lazzaratto, Negri et Virno). Résultat, « Le désert de la critique » comme l’écrit Renaud Garcia dans son ouvrage éponyme. La défaite n’ayant pratiquement été reconnue que par ceux qui sont partis cultiver leur jardin, la plupart de ceux qui restent sur la brèche ne le font que parce qu’ils sont façonnés par un habitus de mélange de révolte, de lutte et d’effort, étant entendu qu’ils n’ont candidaté à aucun poste de pouvoir leur donnant accès à une « position » valorisante ou qu’ils s’en sont vu fermer les portes pour des raisons politiques ou de contexte (après la révolution du capital, les fractions au pouvoir n’ont même plus besoin des sociologues comme c’était le cas dans les années 1960) ; ou bien, pour la plupart, d’autant que ce n’est pas incompatible avec la première proposition, parce que ce sont des croyants, au sens religieux du terme. Pour eux, il suffirait de retrouver la question sociale finalement dans les termes que la sociologie n’emploie même plus ou alors avec des pincettes comme Castel (Les métamorphoses de la question sociale) pour ressusciter la « Question sociale » au sens politique qui était le sien entre 1848 et 1936. [Nous avons déjà abordé ce point dans la brochure « Les chemins de traverse de la question sociale » en insistant sur ce qu’a produit le décentrage de la société capitalisée, par rapport à la question du travail et en conséquence, sur la perte d’importance objective des luttes sur le lieu de travail, , la valeur sans le travail (vivant), etc.]

Si on revient au cas spécifique des États-Unis, on peut aussi se demander ce que veut dire « question sociale » quand l’ouvrier américain se pense depuis presque un siècle comme membre à part entière de la classe moyenne et qu’aujourd’hui, en l’absence de véritable politique de revenus, là-bas comme en Europe de l’Ouest d’ailleurs, ce n’est pas une conscience de classe qui s’exprime, mais un ressenti de déclassement et son lot de ressentiment d’un côté ou alors de l’autre, une révolte contre le racialisme de la police, qui prend une forme émeutière comme dans les manifestations à la suite de la mort de George Floyd. Mais qui, en l’état, semble produire plus de peur de la part du pouvoir et chez les « possédants » que de débouchés et perspectives pour mettre à bas l’ordre établi. Dépassant la question américaine, on peut quand même se poser la question : quels seraient les antagonismes porteurs d’une « question sociale », à la fois « dans et contre » la société capitalisée ? On n’en est même plus à se poser la question du nouveau sujet, comme à l’époque du Marcuse de la fin des années 1960 ou de la nouvelle composition de classes dans l’évolution de l’opéraïsme. Par ailleurs, est-ce bien sérieux de le rechercher dans la figure du sans-papiers, forme radicalisée de l’ancien travailleur immigré, ou dans l’ancienne classe ouvrière en espérant que la crise capitaliste empire, afin qu’elle retrouve son essence révolutionnaire ou la conscience de ses intérêts ? D’autant que, aujourd’hui, le messianisme a changé de camp. Que cela ait été une erreur du jeune Marx de le concevoir à l’origine comme force révolutionnaire importe peu, quand cette voie est reprise et prospère aujourd’hui à travers l’idéologie et les pratiques de big tech sous la forme libertarienne. Ce nouveau discours du capital se moque de contradictions (alliance de forces de globalisation et de cosmopolitisme avec le protectionnisme, l’isolationnisme4 et l’exclusion des étrangers) qui s’avèrent sans danger à court terme parce que non antagoniques. Cette hybridation des intérêts publics et privés est symptomatique du fonctionnement de l’hyper-capitalisme (le niveau I de la domination du capital).

Le désarroi est tel que même dans une situation comme celle du mouvement des GJ, la plupart des « degauche » et même de l’extrême-gauche ne le reconnurent pas comme intéressant et a fortiori aujourd’hui les mêmes, qui ne l’ont pas reconnu à l’époque, vont être confortés dans leur position d’alors, parce que bien sûr que beaucoup de GJ ont dû voter RN ou sont partisans de Trump, mais qu’est-ce que ça prouve ? C’est toute la différence entre un événement et un mouvement qui interagissent d’une part et un résultat électoral d’autre part qui va donner lieu à des exégèses sur le vote par âge, sexe, couleur de peau, milieu social.

Le « dans » est déjà problématique du fait de l’inessentialisation de la force de travail et de la caducité d’une armée industrielle de réserve interne vue la division internationale du travail, mais de quoi peut être fait le « contre » ? De n’importe qui et n’importe quoi effectivement quand d’un côté, Trump est perçu et élu comme représentant « antisystème » ; et quand de l’autre, on n’a que le « choix » entre des politiques identitaires qui ne font qu’imposer une nouvelle morale en phase avec la société capitalisée et un anticapitalisme sans principes pour certains, puisqu’il confine jusqu’à certaines fractions de l’extrême droite, superficiel pour d’autres qui ne critiquent que la financiarisation du capital et le néo-libéralisme.

 

Temps critiques, le 23 novembre 2024

 

Notes

 

1 – Cet article était à l’origine une lettre de réponse au groupe « soubis » qui avait fait circuler le texte : https://www.gaucherepublicaine.org/respublica-idees/un-revers-cinglant-pour-une-bonne-lecon-de-realisme-sociologique/74­36735

2 – Michel Fréher, Producteurs et parasites : l’imaginaire si désirable du RN (La Découverte, 2024), cité dans « Cinq ouvrages pour penser le risque de l’extrême droite », Libération, le 21 novembre 2024.

3 – Des observateurs relèvent le rôle de la hausse de l’inflation imputée à Biden dans la victoire de Trump. Or, cette hausse et en partie due aux efforts de solidarité et de redistribution pendant la crise sanitaire, puis de relance par la demande. Le soutien à la syndicalisation et à la hausse du salaire minimum est allé dans le même sens, mais n’a pas empêché les incohérences de l’administration Biden, par exemple par rapport à la tentative de grève des cheminots pour la sécurité en 2022, où elle a réussi à bloquer toute grève. Or, quelques semaines plus tard, en février 2023, un train de 2,8 kilomètres de long bourré de produits chimiques déraillait et s’enflammait, provoquant un désastre environnemental majeur en Ohio et en Pennsylvanie. Dans les jours suivants, un sénateur de l’Ohio a dénoncé l’impéritie des autorités fédérales et promettait de ne pas oublier la classe laborieuse des Appalaches. Son nom : J. D. Vance, futur vice-président élu de Donald Trump (Le Monde, le 21 octobre 2024).

4 – Contre les apôtres de l’anti-impérialisme ciblant en priorité les États-Unis, on peut renvoyer au discours de Trump aux Nations Unies en 2019 où il a déclaré : « Le futur n’appartient pas aux mondialistes. Le futur appartient aux patriotes. Le futur appartient aux nations souveraines et indépendantes, qui protègent leurs citoyens et respectent leurs voisins et honorent les différences qui rendent chaque pays spécial et unique. » Ce discours rompt complètement avec le tropisme raciste de Trump parlant précédemment de « pays de merde » et de « trous à rats » à leur encontre. Il s’inscrit plus concrètement dans la concurrence que se livrent les États-Unis, la Chine et la Russie sur le continent africain et plus globalement dans leurs rapports avec le « Sud global ». 

 

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