Le capital ne dépasse rien La crise sanitaire avait entraîné l’idée fugace que l’ancien monde pouvait, dans l’urgence, laisser place à un monde nouveau parce que l’événement semblait passer au révélateur ce qu’implique l’acceptation et la reproduction de ce qu’on a appelé la société capitalisée. Celle-ci pouvait être remise en cause non pas au nom d’une prise de conscience, car de tout cela tout le monde ou presque est plus ou moins conscient. En conséquence, il ne s’agissait pas de (…)
Hors-séries
- Un rééquilibrage du national et du global dans le jeu des puissances, Temps critiques
Globalisation et puissances (les contradictions du capitalisme du sommet, le niveau 1 de la domination) Ces notes s’inscrivent dans la continuité de celles sur le Brexit1 il y a quelques années dans la mesure où la tendance à la restructuration en réseaux dans l’hypercapitalisme du sommet qui était pour nous une tendance dominante paraît aujourd’hui contredite. L’opportunité nous en est donnée par la rupture australienne du contrat sur les sous-marins nucléaires français, avec le rôle joué (…)
- La religion, une particularisation de la tension vers la communauté humaine, Temps critiques
Le processus de sécularisation en question Ce qui frappe quand on lit les textes historiques marxistes ou anarchistes sur la religion1, c’est leur virulence dans leur opposition à des forces qui apparaissent comme de véritables suppôts de la réaction ou de la contre-révolution (royalistes en France, phalangistes et nationaux-catholiques en Espagne). Même encore en 1968, une des pires critiques qui pouvaient être proférée par un militant « révolutionnaire » à part « espèce de (…)
- Luttes et syndicats, un marché de dupes, Temps critiques
En France, paradoxalement, c’est dans les années qui suivent mai 1968 que les syndicats dits ouvriers1 se transforment en véritable « force tranquille », anticipant et redoublant la stratégie du Programme commun de la gauche. Le recentrage de la CFDT d’abord, les droits syndicaux dans l’entreprise (lois Auroux de 1982) ensuite, semblent faire entrer le syndicalisme français dans une social-démocratisation déjà en place dans la plupart des pays d’Europe de l’Ouest. Mais patatras, alors que se (…)
- Les Gilets jaunes et la crise de légitimité de l’État, Temps critiques
Après plus d’un an d’actions et de manifestations, on peut se demander pourquoi les Gilets jaunes ont été si durement touchés par la répression policière et cela, globalement dans l’indifférence. Au point d’arriver à une banalisation de cette répression dont le niveau d’intensité interroge tous les « observateurs », tant elle a été disproportionnée par rapport à un soulèvement dépourvu de tout matériel offensif et même défensif et ne cherchant à faire valoir que sa détermination à imposer (...)
- Du droit de pétition au référendum d’initiative citoyenne, Temps critiques
Des formes anciennes d’un droit de pétition existaient en Angleterre dès le XVIe siècle. Mais il est d’abord une plainte ou une suggestion adressée au Parlement par un individu. C’est l’époque des théories du droit naturel qui ont précédé les théories des droits de l’homme à partir de la déclaration anglaise de 1689 (John Locke), qui préfigure la monarchie constitutionnelle et la notion de « souveraineté partagée ». Mais en France aussi les débats du XVIIIe siècle expriment une méfiance par rapport à la démocratie directe et lui préfère un républicanisme basé sur l’idée de représentation. Pour Rousseau, par exemple, la volonté de tous (unité concrète du peuple) est cacophonie et la volonté générale (comme unité transcendante) qu’il désire souveraine doit être confiée à une aristocratie élective. De même, Tocqueville, dans son étude sur l’Amérique (1830) perçoit la possibilité de l’exercice de cette volonté générale comme définitoire de la démocratie, alors que le modèle définit par Madison, l’auteur de la Constitution, est une critique de la démocratie excessive, des fractions et même du principe majoritaire qui pourrait conduire à la dictature. Mais conscient de cela, Tocqueville envisage les corps intermédiaires comme des contre-pouvoirs nécessaires.
- Gilets jaunes : une résistance à la révolution du capital, Temps critiques
Dès l’instant où l’on s’accorde pour reconnaître un rapport entre le mouvement des Gilets jaunes et les processus contemporains de totalisation et de globalisation du capital — processus que nous avons nommé « la révolution du capital » — il importe de caractériser ce rapport et de le faire autrement qu’en termes de simple rapport immédiat cause/ conséquence. Des flots de discours et d’écrits ont été produits qui relèvent de cette détermination causale : les Gilets jaunes sont en révolte contre les dégâts de tous ordres que la « mondialisation » exerce sur eux ; les Gilets jaunes sont les victimes de « La Finance », des firmes multinationales et de l’État rançonneur.
- Un printemps en France ?, Temps critiques
Il s’agit ici, avant tout, comme dans le projet précédent de 2013 sur l’Accord national interprofessionnel (ANI), de parer au plus pressé afin de s’aligner sur les critères de compétitivité des autres pays européens (les fameuses réformes de structure demandées par Bruxelles) qui ont tous mis en place des mesures de flexibilité de la force de travail avec plus ou moins de sécurisation des parcours professionnels.
- L’unité guerre-paix dans le processus de totalisation du capital, Temps critiques
La « guerre totale » moderne, loin d’être l’une des inventions diaboliques de la révolution nazie, est bel et bien, dans tous ses aspects — sans excepter le langage — le produit indiscutable de la démocratie elle-même et plus particulièrement le fruit de la guerre de l’Indépendance américaine et de « la grande révolution française ». C’est un point important soulevé par Korsch dans la mesure où il ne fait pas de ce type de guerre le fruit d’un accident de l’Histoire, sans pour autant en faire un produit exclusif du mode de production capitaliste. Il y a bien sûr un rapport entre démocratie et capitalisme, mais ce rapport est médié par l’institution d’un État-nation, à la fois produit par une guerre originelle et source des suivantes. Au passage la formule de Korsch égratigne la vulgate marxiste de la guerre comme nécessité économique du capitalisme. Même si elle peut avoir des causes économiques, la guerre a toujours un caractère politique.
- Soubresauts, Temps critiques
En juin 1991 nous écrivions : « Pour les pays dominants, les guerres ne sont plus menées d’un point de vue national car il n’y a plus de territoire à défendre contre un ennemi extérieur, depuis la fin de la politique des blocs. En outre, l’universalité du capital et la « libre » circulation des hommes ont depuis longtemps violé « l’intégrité » nationale. Cela ne signifie pas qu’il n’y ait plus d’intérêts nationaux, mais ceux-ci s’inscrivent immédiatement dans une logique mondiale qui les subordonne. Ainsi en va-t-il de la position de la France : après avoir tenté d’affirmer une position particulière, nationale, elle s’est finalement ralliée à l’Amérique, au nom des intérêts supérieurs de la reproduction d’ensemble du système capitaliste. Et tant pis pour ses intérêts au Moyen-Orient !
- La nécessaire critique du travail… est trop urgente pour la laisser aux mains de nos ennemis, Temps critiques
Dans les formes pré-capitalistes, le travail qui était surtout un moyen de domination et l'exploitation purement économique ne revêtait qu'un aspect secondaire ; le but principal n'étant ni l'accumulation, ni la reproduction élargie.
C'est avec le développement du mpc (mode de production capitaliste) qu'on a accolé valeur et travail, en ne cherchant dans le travail que son aspect créateur de valeur et non son caractère disciplinaire d'activité aux ordres.