Interventions


  • Des immigrés aux migrants. À propos de la loi immigration, Temps critiques

    Sans revenir ici sur l’histoire de la nationalité en France, il n’est pas inutile de rappeler quelques données historiques à ce sujet. En France, la nationalité n’existe pas jusqu’en 1797. Il n’y a que le titre de citoyen qui peut être donné à quiconque participe au fait de révolution avant que le droit ne vienne donner les règles de naturalité révolutionnaires, avoir passé 5 ans sur le territoire, avoir bien mérité et payer des impôts correspondant à ceux des citoyens actifs, être (...)

  • Un moment de révolte émeutière, Temps critiques

    1) Tout d’abord, un point essentiel dans le glissement sémantique qui s’est produit entre 2005 et 2023, y compris dans Temps critiques. Ainsi, alors que dans notre article du no 14 (« La part du feu ») nous faisions état d’une révolte des banlieues que nous étions à l’époque peu nombreux à saluer sans la mythifier, aujourd’hui, y compris donc au sein de la revue, si on en croit quelques courriers ou discussions orales, il semblerait que la question de la révolte soit passée au second plan (...)

  • Fin de parcours…, Temps critiques

    Continuité et discontinuité Comme nous l’avons dit dans de précédentes brochures, la lutte autour des retraites, comme le mouvement des Gilets jaunes d’ailleurs ou encore des luttes contre les grands projets, marque un retour embarrassant de la « question sociale », à l’heure où les « problèmes de société » sont posés par les pouvoirs en place, les médias et certains groupes d’opinion comme les questions les plus urgentes à résoudre. Mais cette réapparition s’effectue sous des formes (...)

  • La protestation en cours sur les retraites, Temps critiques

    Les mouvements sociaux depuis 1968 n’ont pas été rythmés par la succession des mandats présidentiels. Ils ont parfois été liés à telle ou telle réforme politique, mais ils ont aussi surgi indépendamment de la temporalité institutionnelle. Ils sont davantage déterminés par les transformations des rapports sociaux et les mutations de l’État, soit le passage d’une société encore dominée par le travail vers une société que nous avons nommée capitalisée où l’exploitation de la force de travail (...)

  • À l’ombre des retraites…, Temps critiques

    Les manifestations de janvier 2023 contre le projet de réforme des retraites, apparaissent comme un « succès » d’un strict point de vue comptable. Il y a du monde dans la rue, à Paris comme en province, avec des villes moyennes et petites qui enregistrent un nombre de manifestants très supérieur à ce qui est habituel ou attendu, rappelant au passage un caractère déjà aperçu au début du mouvement des Gilets jaunes. Mais pour le moment on n’y sent pas d’élan. Mais de ces manifestations (...)

  • Les chemins de traverse de la « question sociale », Temps critiques

    Au début de l’industrialisation, les conditions de classes comme celles qui caractérisent bourgeois et prolétaires sont incommensurables. L’énoncé révolutionnaire républicain de la Déclaration des droits de l’homme (le genre humain) ne contrevient pas à ce caractère. La théorie de Tocqueville sur la démocratie non plus puisque, pour lui, l’égalité en jeu n’est que celle de l’égalité des statuts et la fin des privilèges qui y sont liés. L’abolition des privilèges ne débouche donc pas sur (...)

  • Sur la valeur-travail et le travail comme valeur, Temps critiques

    Le discours performatif du pouvoir Le discours sur la valeur-travail (en fait le travail comme « valeur ») que Macron vient encore de présenter le 9 novembre 2021 est d’abord une reprise de ce que disait Jospin en 1998 pendant le mouvement des Chômeurs avec ses attaques contre l’assistanat et son refus du revenu garanti, complété en 2001 par sa création d’une prime pour l’emploi qui se transformera progressivement en prime d’activité à partir de 2006 ; et ensuite une copie de celle de (...)

  • Les manifestations contre le passe sanitaire : un non-mouvement ?, Temps critiques

    Comme pour le mouvement des Gilets jaunes le choix du samedi n’est pas anodin ; il est en rupture avec la tradition syndicale et ouvrière des manifestations sur le temps de travail. Mais ce qui est en jeu cette fois ce n’est pas la « question sociale », mais pas non plus une question sociétale. On est bien obligé de reconnaître dans cette protestation une sorte d’objet non identifié. Partons de cela. Relevons d’abord la forte diversité géographique et sociologique des manifestants. Des (...)

  • Réfugiés politiques italiens : Quelques réflexions sur amnistie et violence politique, Temps critiques

    L’arrestation les 28 et 29 avril derniers de neuf réfugiés politiques italiens, couverts pourtant par la « doctrine Mitterrand1 » marque une inflexion supplémentaire vers une coopération juridique et policière entre États, au moins au niveau européen. Son absence de toute connaissance et référence politique au contexte italien des années 1970 et 1980 ainsi qu’à la législation encore quasiment fasciste de ce pays (cf. le Code pénal Rocco de 1930, sous Mussolini, toujours en vigueur à (...)

  • Ces forces qui composent et recomposent les luttes autour des retraites, Temps critiques

    Un mouvement non réductible à celui sur les retraites Depuis le 5 décembre 2019 c’est la grève qui est de retour, alors que depuis Nuit debout, le mouvement contre la loi-travail et l’événement Gilets jaunes, cette forme de lutte apparaissait en retrait, — si on excepte la dernière grève à la SNCF — et avec elle les manifestations de type syndical. Les forces qui composent le mouvement actuel sur les retraites viennent rencontrer, mais aussi heurter d’autres forces qui, soit les (...)

  • Au-delà de la convergence, une nouvelle forme de politisation ?, Temps critiques

    Il est vain de chercher à savoir qui tire la charrue. Pour certains, le mouvement de grève qui vient de démarrer a été préfiguré par l’existence d’un mouvement comme celui des Gilets jaunes ; pour d’autres, le mouvement actuel recadre enfin les choses (effet de masse, revendications claires, représentants légitimes, actions contrôlées), même s’il reconnaît sa dette envers les Gilets jaunes dont le caractère spontané de leur révolte aurait réveillé plus d’un syndiqué de base. La reprise (...)

  • Mais pourquoi les pensions ? Les grands hôtels, c’est tellement mieux. À propos des retraites, Temps critiques

    Prémisse théorique Que l’on doive mourir est bien certain. Mais que l’on doive toujours tenir par la main la sœur misérable de la mort, c’est-à-dire la vie forcée, et bien ceci ne semble pas du tout inscrit dans le prétendu ordre naturel. Pourtant, même des syndicalistes de gauche du type de ceux de Solidaires ou des chercheurs dits engagés1 présentent la réforme des retraites que le gouvernement Macron tente d’imposer comme allant à l’encontre du « désir de libération installé dans la (...)

  • Grève et “besoin de grève”, Temps critiques

    Le mouvement du Tous ensemble de 1995 a été la dernière représentation d’une lutte collective au-delà de la stricte perspective classiste, mais sans qu’affleure une tension vers la communauté humaine puisque le mouvement est resté centré sur la défense de la condition salariale à travers le refus de la réforme de la Sécurité sociale, pilier du mode de régulation fordiste des conflits de classes. Si référence communautaire il y eut, ce n’était que celle de la communauté du travail encore (...)

  • État-réseau et politique du genre, Temps critiques

    Comment faire tenir ensemble, d’un côté l’existence concrète d’une intervention de l’État sur l’École dans le cadre des « ABCD de l’égalité » et de l’autre la théorisation que Temps critiques a produite au moment du supplément sur « l’État n’est plus éducateur1 » ; c’est-à-dire d’un État qui n’interviendrait plus qu’au coup par coup, dans le cadre d’une simple gestion, sans volonté politique particulière. Il faut se rendre à l’évidence : il y a bien là une stratégie qui doit précipiter une (...)

  • Flexisécurité à la française, Temps critiques

    Une attaque généralisée ? Les différents types d’actions contre l’accord national interprofessionnel (ANI) pour l’emploi du 11 janvier 2013 montrent bien comment les choses sont appréhendées par les différentes forces de gauche. Par les termes utilisés, elles appellent à la mobilisation de toutes les catégories de travailleurs comme si le projet de loi les visait toutes de la même façon dans une attaque unitaire (patronat-État-syndicats de collaboration de classes) qui mériterait une (...)

  • L’Insurrectionnalisme qui vient ?, Jacques Wajnsztejn, Gzavier

    Pourquoi « l’insurrectionnalisme » ? Il n’est pas toujours des plus évident de saisir l’ensemble des thèses et agissements du courant politique qu’on peut désigner aujourd’hui comme insurrectionnaliste, d’autant qu’il regroupe plusieurs composantes. Mais ici, l’insurrectionnalisme qui nous occupera est celui qui s’est cristallisé autour du livre L’Insurrection qui vient1. Certains qualifient ce courant d’« autonome » car il marquerait ses distances envers les organisations (...)

  • Anciennes et nouvelles fictions sur l’École de la République , Temps critiques

    Ce numéro d’Interventions est composé de deux parties. La première partie, plus théorique, essaie de replacer la crise de l’école dans la transformation des rapports sociaux de la société capitalisée et de son État. Pour y parvenir, on doit s’affranchir de toutes les lamentations, à contenu conservateur comme à contenu progressiste, sur la dissolution des médiations de l’État-nation. La seconde partie est constituée d’une intervention plus pratique dans les luttes menées par les (...)

  • À propos des luttes actuelles dans l’Éducation Nationale

    Les luttes actuelles dans l’école et autour de l’école sont le produit d’une double crise. Tout d’abord, crise de « l’instruction » des enfants par l’école. Cette école contemporaine achève de dissoudre l’institution de l’éducation dans des « dispositifs de formation » qui doivent se prolonger « tout au long de la vie ». En tendance, la formation « professionnalise » les élèves en les adaptant à leur fonction de gestionnaires de leurs ressources humaines. L’État-nation n’est donc plus (...)

  • Hard blocking

    Le mouvement actuel n’est pas un mouvement revendicatif Comme celui de novembre, il ne revendique rien, au sens strict, ne propose rien non plus, mais il exprime un refus de la situation qui trouve son point d’ancrage dans projet de loi sur « l’égalité des chances » et particulièrement le cpe. Cette absence de revendication s’exprime de plusieurs manières : – par un refus qui tend à englober toutes les formes de précarisation (le refus du cne est clairement énoncé) ; – par son (...)

  • Blocages et embauchages

    Les premières étincelles du mouvement ont été lancées par les étudiants des premiers cycles universitaires. Preuve, s’il en fallait, que l’ancienne « misère en milieu étudiant »1 n’est plus ce qu’elle était. La conscience mystifiée de futurs cadres que certains insurgés de mai 68 attribuaient aux étudiants de l’université de classe finissante, s’est convertie en connaissance lucide des misères concrètes à l’époque de l’université de masse. En effet, la distance s’est creusée entre le « on (...)

  • Ne pas travailler le 16 mai (lundi de Pentecôte). Une évidence qui ne souffre aucune justification

    C'est au contraire le point de départ d'une révolte qui doit déboucher sur une action d'indiscipline. Il n'y a pas à la justifier car si la grève et autres formes d'action directe gardent une certaine légitimité de compassion dans le secteur productif et les usines en particulier, ce n'est pas (plus) le cas dans les secteurs de la reproduction et particulièrement dans le secteur des services publics. La volonté étatique d'instaurer un service minimum dans les (...)

  • L’affrontement des références et la barbarisation des rapports sociaux

    Dans la société de classe moderne, l'existence sociale d'un individu était largement déterminée par sa plus ou moins grande appartenance aux principales institutions de l'État-nation : famille bourgeoise, propriété, patrimoine, église, cercle d'hommes, etc. L'entrée dans la vie des individus était marquée du sceau de cette appartenance de classe. Certes, la société bourgeoise s'est toujours accommodée d'une promotion sociale qui, à travers l'école (...)

  • The show must go on !

    Le statut originel des intermittents correspond exactement au mode de régulation fordiste des rapports sociaux et plus particulièrement à la conception du chômage qu’il induit. Un chômage considéré comme un temps d’activité non pas parce qu’il correspondrait à un travail concret réel, mais parce qu’il fait partie du processus global de travail abstrait. C’est en cela qu’il continue donc à être rétribué, non pas en tant que salaire direct et privé (un salaire lié au travail d’un individu (...)

  • Lucy, une prostituée ?, Jacques Guigou

    La prostitution est-elle une activité générique d'homo sapiens ? Dans les sociétés où la prostitution a existé, les prostituées ont-elles pratiqué une activité universelle, libre et consciente qui réalisait un accomplissement “authentique” (sic) de leur individualité et de la vie en commun ? La promotion de la prostitution “libre” et la “libération” généralisée de la pornographie esthétisée, n'exprime-t-elle pas, comme quelques autres “avancées” biotechnologiques et (...)

  • Passé, présent, devenir. Des luttes italiennes des années 70 aux extraditions d’aujourd’hui : un État d’exception permanent, Temps critiques

    Avant toute chose, il nous faut dire pourquoi il faut soutenir Paolo Persichetti et avec lui, les autres réfugiés politiques italiens. En effet il ne s'agit pas là d'un soutien humaniste ou d'un désir de simple justice, comme ils pourraient être accordés à tout réfugié. Il s'agit d'un soutien politique à ce qui fut un combat révolutionnaire, quelle que soit l'opinion qu'on ait vis-à-vis de tel ou tel groupe politique et aussi des moyens mis en œuvre. Comme le (...)